Note de positionnement du groupe de travail « Climat et Santé » de l’APCC
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Réduire (pour de vrai !) l’empreinte environnementale du secteur de la santé pour “d’abord, ne pas nuire” ….
Focus sur les produits et services spécifiques à ce secteur
Nous avons l’habitude de lire que le secteur de la santé pèse 8 à 10 % des émissions de gaz à effet de serre en France et ceci, sans compter les autres impacts environnementaux.
Une partie des émissions de GES du secteur porte sur l’inefficacité énergétique des bâtiments, les transports , l’alimentation, etc. Ce sont des postes d’émissions sur lesquels la mesure est fiable et les actions possibles connues et transverses à plusieurs secteurs d’activité.
Cependant, pour tout ce qui concerne les éléments (produits et services) spécifiques à ce secteur (comme les achats de médicaments, etc.) ces chiffres ne sont qu’une évaluation fondée principalement sur des approximations dont le taux d’incertitude est de plus ou moins 80% et qui ne tiennent pas compte des spécificités de chaque prestation ou produit. Ainsi ce poste a de grandes chances d’être mésestimé.
Pour réduire son empreinte, il faut donner aux professionnels du secteur de la santé les moyens de mesurer leurs impacts en maîtrisant l’Analyse du Cycle de Vie (ACV) des produits qu’ils consomment et prescrivent.
À l’heure de la prise de conscience collective sur les grands enjeux environnementaux, de nombreuses filières professionnelles se structurent autour de méthodes et d’outils d’analyse des impacts environnementaux et d’éco-conception. C’est le cas par exemple d’AGRIBALYSE pour le secteur de l’agroalimentaire, ou encore de la base INIES pour le secteur du BTP.
Le secteur de la santé quant à lui, s’appuie seulement sur la méthode générale du Bilan des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES).
De plus, quand il est réalisé, ce dernier exclut quasi-systématiquement les consommations c’est-à-dire : les médicaments ; les dispositifs médicaux ; les déplacements du personnel, des patients et de leurs visiteurs ; etc. Des postes d’émissions appartenant aux émissions dites indirectes qu’il n’est pas obligatoire de prendre en compte à date. Pourtant, cela représente près de 65% des émissions de gaz à effet de serre du secteur !
Aujourd’hui, la part du secteur contrainte par la loi à réaliser la mesure de ses émissions de gaz à effet de serre (c’est-à-dire les structures publiques de plus de 250 salariés et les structures privées de plus de 500 salariés) n’est pas suffisante : 90 % des cliniques privées et 100 % des EHPAD sont de fait exclus de la liste !
L’absence d’outil, de méthode et d’expertise adaptés à ce secteur empêche tous les professionnels du secteur de la santé qui ont une démarche volontaire et souhaitent s’engager dans l’amélioration des aspects environnementaux, sanitaires et sociaux de leurs pratiques (tout en maîtrisant leur coût) d’agir efficacement en ce sens.
En effet, pour pouvoir prendre des décisions éclairées et durables pour les années à venir de manière à réduire véritablement l’impact environnemental du secteur de la santé en éco-concevant les pratiques, les soins et les bâtiments, il est impératif :
- de connaître le cycle de vie des « consommables » utilisés, notamment leur provenance et leur empreinte carbone ;
- de réaliser le bilan des ressources utilisées en énergie, en matière première et en eau ;
- de pouvoir identifier et mesurer tous les déchets que les soins génèrent : les cartons d’emballages, les films plastiques, les palettes, les flacons, les dispositifs médicaux à usages uniques, les effluents liquides et gazeux, les métaux précieux et non précieux jetables , les DAS, les DASRI ;
- d’intégrer l’« ACV » (Analyse de Cycle de Vie) systématiquement dans les critères de choix des établissements, des centrales d’achats et de référencements et des Groupements Hospitaliers de Territoires (GHT).
Pour arriver à réduire l’empreinte GES de ce secteur de 40 % d’ici 2030, voire de 55 % comme l’exige l’Europe, les industriels des produits de santé et médicaments doivent impérativement adresser la question et fournir l’ACV de tous leurs produits. Ceci permettra de constituer une base de facteurs d’émission fiable privilégiant les produits à faibles impacts, à l’instar du secteur du bâtiment avec les bases de données INIES.
C’est pourquoi, nous vous proposons ici 4 obligations fondamentales et indispensables à mettre en oeuvre pour réduire véritablement l’impact environnemental du secteur de la santé quand à ces produits et services :
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En parallèle de ces 4 actions, une rubrique « reconditionné » et/ou « reprocessing » doit être créée dans la Base Carbone.
Pourquoi c’est important :
Aujourd’hui, sans la prise en compte de ces mesures, nous constatons des situations absolument contre-productives en termes d’impact environnemental et sanitaire, qui vont bien au-delà de la seule problématique des émissions de gaz à effet de serre.
Par exemple, faute de connaître la composition exhaustive des produits et dispositifs de santé, nous détruisons chaque année des terres rares, du verre médicamenteux, des métaux précieux, qui pourraient être réutilisés dans une dynamique d’économie circulaire. Un gâchis qui n’est plus justifiable au regard de la raréfaction des ressources limitées de la planète et des conséquences environnementales et sociales de l’extraction de ces dernières.
Également, en ne mesurant pas et en ne se donnant pas les moyens d’agir sur son propre impact environnemental, le secteur de la santé contribue à alimenter le changement climatique, la perte de biodiversité, la pollution, etc. dont les conséquences sur la santé humaine sont avérées et terribles.
Par ailleurs, à l’heure où nous parlons de souveraineté alimentaire et industrielle, le secteur de la santé n’est pas en reste : les rejets de résidus de médicaments par les usines à l’étranger ne sont pas toujours maîtrisés contrairement à la production française. Privilégier la production de médicaments dans ces pays concourt à l’émergence de bactéries multirésistantes dans le monde entier.
Dans un monde dont l’actualité nous rappelle l’instabilité des relations internationales, le monopole de certains pays sur des produits comme l’insuline devraient être pris en considération pour anticiper les risques et les conséquences sur les patients dus à une éventuelle rupture d’approvisionnement.
En réduisant l’empreinte environnementale du secteur de la santé, nous cherchons finalement à appliquer le premier principe de la médecine : “d’abord, ne pas nuire”.
Nous vous souhaitons une bonne lecture de ces documents.
N’hésitez pas à aller consulter notre annuaire des membres, afin de trouver l’expert.e qui pourra vous accompagner dans votre démarche !
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